Fiches de dangers

   Renforcer la culture de la prévention 

 

  L'AFTIM Bossons Futé est une association loi 1901 reconnue d'utilité publique.  

 

 

 

                                                                                                       

Alcool [ex SMR](Archive)

FICHE DE RISQUE BOSSONS FUTE N°24

1. INTRODUCTION

  • Les alcools de consommation alimentaire peuvent être pris sous différentes formes : vin, bière ou spiritueux.
  • On estime que 80% de la population âgée du plus de 15 ans consomme de l’alcool, après le contact initiatique dans l’enfance qui se fait vers 7 ans. La consommation d’alcool est de 10,7 litres d’alcool par an et par habitant, plaçant la France en 4ème position en Europe, derrière le Luxembourg, l’Irlande et le Portugal (le Luxembourg est en tête des ventes mais pas des consommations).
  • L’alcoolisation est un sujet tabou qui met en danger non seulement la personne mais autrui et qui a un retentissement non seulement personnel mais social et professionnel. Se taire c’est être complice.

2. PROFESSIONS CONCERNEES

Toutes les professions sont exposées avec des situations particulières :

  • Professions pénibles et/ou avec exposition à la chaleur : bâtiment, agriculture, manutention
  • Professions en rapport avec le public : artisans, représentants, patrons de café, agents de police, journalistes, artistes, corps médical...
  • Travaux répétitifs, sans intérêt, monotones, sans responsabilité
  • Milieux professionnels où les relations sont conflictuelles, où le contexte culturel est dévalorisant.

3. DESCRIPTION - EVALUATION DU RISQUE

3.1. L'ALCOOL DANS L'ORGANISME

  • L’alcoolémie est le taux d’alcool dans le sang. Approximativement il représente la “quantité d’alcool pur ingéré” divisée par le “poids du sujet x 0,7 pour les hommes ou 0,6 pour les femmes" (formule de Widmarck).
  • L’alcool absorbé passe rapidement dans le sang et le pic d’alcoolémie est atteint au bout d’une demi heure à jeûn et d’une heure pendant un repas.
  • Les équivalents d’alcool sont les suivants (chaque consommation servie dans le commerce contient entre 8 et 12 grammes d’alcool pur) :
    • 25 cl de bière à 5 degrés
    • 2.5cl d’un digestif à 45 degrés
    • 10 cl de champagne à 12 degrés
    • 10 cl de vin rouge ou blanc à 12 degrés
    • 2.5 cl de pastis à 45 degrés
    • 25 cl de cidre sec à 5 degrés
  • Attention, les verres domestiques sont 2 à 3 fois plus dosés.
  • Pour un sujet de 75 kg qui a bu un verre de 10 cl de vin blanc à 12 degrés, un verre 10 cl de vin rouge et une coupe de champagne, soit 3 verres du commerce donc 30 grammes d'alcool pur, le taux d’alccolémie va atteindre en moyenne :
    • chez un homme = 0,68 g/l (3 x 10 cl x 12 degrés / 75kg x 0,7)
    • et chez une femme = 0,8 g/l (3 x 10 cl x 12 degrés / 75kg x 0,6)
  • Il existe de nombreux paramètres liés à l'âge, au sexe, à l'état de santé, à la vulnérabilité individuelle, qui font que ces chiffres sont très théoriques et ne représentent qu'une moyenne. Ainsi, 1 verre du commerce (10 grammes d'alcool pur en moyenne), selon ces variables, peut donner, selon les sujets, une alcoolémie variant de 0,15 à 0,45 g/l.
  • Le coma éthylique peut survenir à partir d'une alcoolémie de 5 g/l.
  • L’alcool est détruit à 90-95% par les cellules hépatiques. L'alcoolémie baisse de 0,15 g/litre et par heure.

3.2. LES CONSOMMATEURS D'ALCOOL

On estime la répartiton de la population adulte vis à vis de l’alcool de la façon suivante :

  • Les non-consommateurs (abstinents primaires ou secondaires) : 10% de la population
  • Les consommateurs "modérés" (l’usage d’alcool reste inférieur aux seuils de toxicité définis par l’OMS, en dehors de toute situation à risque) : 65% de la population
  • Les consommateurs en mésusage : 25% de la population
    • sans dépendance :
      • consommateur à risque (usage à risque) : consommation ponctuellement supérieure aux seuils de toxicité mais sans retentissement médical, psychique ou social : 10% de la population
        Le risque est ponctuel et situationnel (conduite automobile, travail sur machines dangereuses, femme enceinte...)
      • consommateur à problèmes (usage nocif) : consommation régulière, supérieure aux seuils de toxicité avec retentissement médical, psychique et/ou social décelable : 10% de la population
        Les effets nocifs sur la santé s'établissent sur le long terme.
    • avec dépendance (consommateur alcoolo-dépendant) : consommation avec perte de maîtrise de la consommation : 5% de la population

3.3. DESCRIPTION DES RISQUES

3.3.1. L'alcoolisation aiguë

L’acoolisation aiguë peut entraîner selon les individus et les habitudes de consommation :

  • Des problèmes de santé :
    • coma pour des alcoolémies supérieures à 5 g/l
    • hépatite aiguë
    • troubles du rythme cardiaque
  • Des accidents :
    • de la circulation (à 0,50g/l d'alcoolémie, le risque est X 2 ; à 0,80 g/l le risque est X par 10)
    • du travail
    • domestiques
  • Des troubles du comportement :
    • violences verbales et/ou physiques
    • homicides
    • comportements sexuels à risques
    • instabilité professionnelle

3.3.2. La consommation d'alcool chronique

La consommation d'alcool chronique entraîne des :

  • Risques somatiques :
    • Troubles digestifs : pituite matinale, stéatose, cirrhoses, pancréatites
    • Cancers digestifs : bouche, oesophage, foie
    • Maladies cardiovasculaires : hypertension artérielle, troubles du rythme cardiaque, myocardiopathies
    • Maladies neurologiques : crampes musculaires, polynévrites des membres inférieurs, névrite optique rétrobulbaire, atrophie cérébrale et cérébelleuse, encéphopathie de Gayet-Wernicke, syndrome de Korsakoff
  • Risques psychologiques et psychiatriques :
    • Altération cognitive
    • Altération relationnelle
    • Anxiété, dépression
    • Détérioration mentale
    • Suicide
  • Risque social :
    • Déinsertion sociale, familiale et professionnelle
    • Problèmes judiciaires
  • Chez la femme enceinte : syndrome d'alcoolisation fœtale (S.A.F.)

3.3.3. La dépendance

  • La dépendance selon le DSM IV (1994) :
    • La dépendance est un mode d’utilisation inapproprié d’une substance, entraînant une détresse ou un dysfonctionnement cliniquement significatif, comme en témoignent trois (ou plus) des manifestations suivantes, survenant à n’importe quel moment sur la même période de 12 mois :
      • tolérance, définie par l’une des manifestations suivantes : besoin de quantités nettement majorées de la substance pour obtenir une intoxication ou l’effet désiré ; effet nettement diminué en cas d’usage continu de la même quantité de substance
      • sevrage, comme en témoigne l’une ou l’autre des manifestations suivantes : syndrome de sevrage caractéristique de la substance ; la même substance (ou une substance apparentée) est prise dans le but de soulager ou d’éviter les symptômes de sevrage
      • substance souvent prise en quantité supérieure et sur un laps de temps plus long que ce que la personne avait envisagé
      • désir persistant ou efforts infructueux pour réduire ou contrôler l’utilisation de la
      • temps considérable passé à faire le nécessaire pour se procurer la substance, la consommer ou récupérer de ses effets
      • d’importantes activités sociales, occupationnelles ou de loisirs sont abandonnées ou réduites en raison de l’utilisation de la substance
      • poursuite de l’utilisation de la substance malgré la connaissance de l’existence d’un problème physique ou psychologique persistant ou récurrent déterminé ou exacerbé par la substance.
    • Préciser :
      • Avec dépendance physique : signe de tolérance ou de sevrage (item 1 ou 2 présent)
      • Sans dépendance physique : pas de signes de tolérance ou de sevrage (items 1 et 2 absents)
  • La dépendance ne concerne que 5% des buveurs. Elle apparaît plus ou moins rapidement dans la population de buveurs excessifs. Elle se caractérise par la présence d’au moins 3 des manifestations du DSM IV (énumérée ci-dessus). Un élément caractéristique de l’alcoolodépendance est le déni : incapacité de reconnaître sa dépendance car psychiquement trop traumatisante.
  • Le milieu professionnel est souvent un facteur favorisant et légitimant la consommation d’alcool (repas d’affaires arrosés dans 71% des cas, pots divers : mariage, naissance, signature de contrat, promotion, mutation, retraite, fêtes...).

3.4. COUT SOCIAL

  • Coût médical : 10 à 15% des dépenses de santé
  • Coût pour l’entreprise : 50% des absences et des pertes de productivité liées à :
    • diminution de l’efficacité, de la productivité, de la qualité des performances professionnelles
    • absentéisme
    • modification du comportement par effet désinhibiteur de l’alcool et impact sur les relations de travail
    • violence verbale ou physique contre les objets et les personnes
    • accidents de travail sur les machines ou de circulation
    • mise en danger de la vie d’autrui
  • Coût pour la collectivité : 20% des dépenses liés aux accidents de la route

4. RISQUES POUVANT ETRE ASSOCIES

  • Tabagisme, association très fréquente augmentant les risques de cancers aéro-digestifs
  • Association avec d'autres produits psychotropes : produits illicites (haschisch, cannabis, cocaïne, héroïne), médicaments licites détournés de leur usage (codéine, benzodiazépines, antalgiques de type morphinique...) ou illicites (amphétamines, ecstasy, crack...)
  • Troubles alimentaires : erreurs alimentaires, anorexie
  • Syndrome anxio-dépressif, avec prise médicamenteuse plus ou moins contrôlée (tranquillisants, anxiolytiques, antidépresseurs, modificateur de l’humeur...)

5. RISQUES POUR LA SANTE

5.1. ACCIDENTS DU TRAVAIL

  • Ils sont liés à la baisse de la vigilance et à la désinhibition liée à l’alcool.
  • L’alcool augmente la fréquence des accidents de travail et de trajet avec un risque non seulement pour le salarié mais également pour son entourage.
  • Les risques d’accidents sont proportionnels à l’alcoolémie, bien qu’ils soient variables selon les sujets. Ils sont multipliés par :
    • 2 pour une alccolémie à 0,5 g/l
    • 5 pour une alcoolémie à 0,7 g/l
    • 10 pour une alcoolémie à 0,8 g/l
    • 35 pour une alcoolémie à 1,2 g/l
    • 80 pour une alcoolémie à 2 g/l

5.2. MALADIES PROFESSIONNELLES

  • L’alcool potentialise les maladies professionnelles, notamment celle entraînant des affections digestives ou neuro-psychiatriques notamment lors d'utilisation de produits industriels hépato-toxiques ou neuro-toxiques.

5.3. AUTRES RISQUES

  • En plus des pathologies indiquées en 3.3. le consommateur d’alcool met en danger la vie d’autrui.

6. SURVEILLANCE MEDICALE

5.1. SURVEILLANCE REGLEMENTAIRE

Elle n’a pas de spécificité mais les consommateurs en mésusage exposés à des produits neurotoxiques et/ou dangereux sur le plan digestif, doivent être particulièrement suivis en raison du danger cumulatif de l’alcool et de ces produits.

6.1.1. VISITE MEDICALE

  • Selon les risques professionnels

6.1.2. EXAMENS COMPLEMENTAIRES

  • Selon les risques professionnels

6.1.3. VACCINATIONS

  • Selon les risques professionnels

6.2. SURVEILLANCE CONSEILLEE

6.2.1. VISITE MEDICALE

  • Le dépistage des consommateurs en mésusage doit être, sinon systématique, du moins le plus large possible, ainsi que l’étude du degré de motivation à l’arrêt d'alcoolisation et l'étude de la dépendance avant toute proposition de sevrage.

6.2.2. EXAMENS COMPLEMENTAIRES

  • Un bilan sanguin peut être envisagé pour étudier le retentissement éventuel de la consommation d'alcool, notamment sur la fonction hépatique : gamma GT, transaminases, triglycérides, CDT. Le dosage de la CDT est l'examen le plus spécifique. Toutefois aucun de ces examens ne permet de poser un diagnostic de dépendance et n'est totalement spécifique d'une consommation nocive d'alcool.
  • Des tests de vigilance peuvent être pratiqués notamment chez les personnes travaillant sur des machines dangereuses ou de précision.
  • Test VIH chez des patients ayant des conduites sexuelles à risque favorisées par l'usage à risque d'alcool

6.2.3. VACCINATIONS

  • DTPolio

6.3. SUIVI POST PROFESSIONNEL

  • Selon les risques professionnels

6.4. DOSSIER MEDICAL

  • Pas de durée réglementaire de conservation du dossier médical mais la prescription en matière de responsabilité médicale est de dix ans à compter de la date de consolidation d'un dommage éventuel.

7. RISQUES POUR L'ENVIRONNEMENT

7.1. POLLUTIONS

7.2. ACCIDENTS, INCENDIE, EXPLOSION

7.3. AUTRES RISQUES

  • Conduites socialement dangereuses (injures, agressions...) d'autant plus graves que la personne est investie d'une fonction d'autorité
  • Conduite physiquement dangereuse (accident d'inattention, somnolence...) d'autant plus grave que la personne occupe un poste de sécurité

8. ACTIONS PREVENTIVES

8.1. PREVENTION TECHNIQUE COLLECTIVE

8.1.1. MISE EN APPLICATION DE LA LEGISLATION

  • Mise en application de la législation relative à l’alcoolisation sur les lieux de travail dans le règlement intérieur afin de :
    • limiter l’introduction des boissons alcoolisées dans l’entreprise selon les textes officiels du Code du travail
    • interdire l'entrée et la présence de personnes en état d’ébriété sur le lieu de travail
    • permettre aux salariés de se désaltérer en leur proposant gratuitement des boissons non alcoolisées
  • Le non respect de cette législation peut constituer une faute inexcusable de l’employeur et peut engager sa responsabilité pénale.
  • L’application de la législation doit faire l’objet de procédures écrites afin de permettre une réflexion collective et la mise en place de conduites à tenir pratiques et consensuelles. Par exemple en cas de suspicion d’alcoolisation :
    • conduite à tenir par les collègues :
      • informer le salarié de son état de santé incompatible avec un travail de qualité
      • proposer l’interruption de l’activité à négocier avec le supérieur hiérarchique
      • reconduire à domicile avec l’accord de la hiérarchie
    • conduite à tenir par le responsable :
      • refuser l’accès au poste
      • faire reconduire à domicile ou maintenir à l’infirmerie en attendant le dégrisement
      • faire prévenir éventuellement la famille et/ou le médecin traitant
      • faire un bref compte-rendu écrit à conserver dans le dossier
      • au retour au poste procéder à un entretien pour rappeler la loi, proposer une aide médicale, sociale ou professionnelle si nécessaire
      • Il peut être utile de prévoir une visite systématique de médecine du travail à la demande de l'employeur telle que prévue à l'Art R 4624-18 du code du travail pour tout salarié suspecté d'alcoolisation.
  • Le règlement intérieur peut prendre des dispositions plus contraignantes par exemple sur l’interdiction de toutes boissons alcoolisées et/ou sur les conditions de contrôle de l’alcoolémie. Le dépistage de l’alcoolémie ne peut pas être systématique mais il peut être prévu dans le règlement intérieur pour les postes de sécurité c'est à dire ceux dont le comportement de l'individu peut mettre en danger la vie d'autrui.
  • L’alcootest ne peut pas être imposé, sauf par un officier de police judiciaire en cas de crime, de délit ou d’accident de la route. Cependant son refus peut être un motif d’éviction temporaire du poste au titre du principe de précaution.
  • L'alcootest sera fait par l'employeur ou par son représentant, en présence d'un témoin. Quant au résultat de l'alcoolémie, il est couvert par le secret médical.

8.1.2. AMELIORATION DES CONDITIONS DE TRAVAIL

  • La prévention passe également par l’amélioration des conditions de travail. Parmi d’autres citons :
    • Possibilité de participer à l’élaboration de son planning, évitant ainsi l’isolement lié aux roulements aléatoires
    • Relations sociales satisfaisantes
    • Locaux de permanence accueillants, proposant des activités
    • Lutte contre les facteurs de stress
    • Recours posssible à des médiateurs en cas de difficultés au sein de l’entreprise
    • Temps libéré pour les démarches sociales

8.2. FORMATION, SENSIBILISATION

  • Une information sur les procédures disciplinaires en cas d’alcoolisation problèmatique doit être faite à tous les salariés. Ces procédures seront différentes selon le type de poste.
    • Pour les emplois à risque aucune justification d’un état d’ébriété n’est admissible et entraine un licenciement pour faute grave.
    • Pour les emplois sans risque particulier les sanctions peuvent être modulées de l’avertissement au licenciement pour faute grave en cas d’intempérance réitérée ayant des répercussions sur la marche de l’entreprise.
  • En raison de l’importance des conduites d'alcoolisation sur les lieux de travail et des risques qu’il comporte, une action de prévention doit être systématiquement menée dans les entreprises. L’information doit être pilotée, conduite par le CHSCT et le service de santé au travail, en liaison avec la direction, avec la participation de volontaires, avec des objectifs clairs.
  • Elle doit être indépendante de la direction mais soutenue et encouragée par elle. Ele doit disposer de moyens : local, temps, formation, financement d’intervenants extérieurs. Elle doit être régulièrement évaluée.
  • L'information doit être objective et loyale, non pénalisante et non traumatisante. Elle peut être globale ou par service. Elle se fait pour les consommateurs d'alcool comme pour les non-consommateurs. Elle doit être faite à tous et notamment à la hiérarchie.
  • Elle doit porter sur :
    • les dangers de l’alcool souvent méconnus et/ou niés
    • les doses acceptables
    • l’évaluation de leur consommation individuelle par les salariés
    • les notions d'usage et de mésusage
    • la responsabilité de l’entourage dans l’alcoolisation d’autrui
    • l’analyse des causes, des facteurs conduisant au mésusage voire à la dépendance alcoolique
    • l’analyse des motivations à l’arrêt de la consommation d'alcool
    • les méthodes de sevrage et l’obligation d’une cessation durable, voire définitive du recours à l’alcool pour les consommateurs dépendants
    • la nécessité d’un suivi et la possibilité d’un entretien personnalisé
    • les lieux ressources d'aide au sevrage et au maintien de l'abstinence du département
  • Elle permet éventuellement de repérer les différents types de consommateurs et donc ceux qui sont susceptibles de changer d’habitude de consommation avant le passage au stade suivant.
  • La plupart des interventions collectives en entreprise commencent par une réunion plénière de 2 heures ouvertes à tous et présentant la problématique de l’alcool. A la suite de cette réunion il est possible de mettre en place des groupes de réflexion sur les modifications de comportement au sein de l’entreprise, sur la prise en charge des collègues présentant une possible consommation d'alcool problèmatique...

8.3. PREVENTION INDIVIDUELLE

La prise en charge des consommateurs en mésusage, notamment consommateurs à usage nocif et alcoolo-dépendants, nécessite de l’empathie, une écoute patiente, la capacité de délivrer une information scientifique et neutre, la fixation d’objectifs possibles, réalistes et accessibles.

8.3.1. LE DEPISTAGE

  • Le bon usage de l'alcool ne peut procéder que d'une démarche individuelle d'où l'intérêt d'une étude systématique des consommateurs d'alcool afin de faire le point de leur type de consommation avec eux. On peut s'aider :
    • de l'interrogatoire : évaluation de la consommation déclarée d'alcool (CDA), questionnaires AUDIT, DETA et plus récemment FACE
    • de l'examen clinique : grille de Le Gô, même si cette grille ne permet de dépister que les consommateurs à usage nocif à un stade déjà évolué de leur alcoolisation
    • voire d'un bilan biologique bien qu'il ne soit pas totalement fiable (VGM, triglycérides, gamma GT, CDT)
    • d'un test d'abstinence : plan de 10 jours de Vie Libre par exemple
  • Au terme de ce bilan seront à définis pour chaque individu la situation de consommation, le mode de consommation et le lieu de consommation afin de le situer dans une des 3 catégories de consommateurs : non-consommateur, consommateur modéré, consommateur en mésusage.
  • En cas de mésusage va se poser le problème de l'exploration de la dépendance. Mais même en l'absence de dépendance une prise en charge psychologique et sociale peut-être nécessaire pour tous les types de mésusage.
  • Le salarié en mésusage de l'alcool sans dépendance :
    • C'est celui pour lequel l'intérêt du dépistage est le plus fort car une prise de conscience précoce permettra d'éviter des conséquences graves.
    • En cas de mésusage à risque (consommateur occasionnel sans troubles associés), l'objectif est de ramener la consommation dans les limites fixée par l'OMS par une information sur les risques et un apprentissage des consommations sans risque (exemple : retour au domicile après une réunion, un repas bien "arrosé"...).
    • En cas de mésusage à problème (consommation excessive, régulière, avec retentissement médical ou psychique ou social), l'objectif est le même mais il faut aider le sujet à prendre conscience des liens entre ses troubles et sa consommation et l'aider à modifier ses comportements de consommation.
  • Les salariés dépendants :
    • En cas de dépendance l'objectif est d'obtenir un prise de conscience afin d'aider la personne à un arrêt durable, voire définitif, de la consommation d'alcool. Il faut reconnaître les difficultés spécifiques du sujet , mettre en place une prise en charge des difficultés associées, le préparer au sevrage, en collaboration avec l'entourage et les professionnels concernés et enfin l'accompagner secondairement pour maintenir l'abstinence.

8.3.2. LE SEVRAGE ALCOOLIQUE

Le sevrage alcoolique ne concerne que les alcoolo-dépendants. Il n'est possible que pour les buveurs motivés.

  • La prise de conscience :
    • Elle constitue la première et l'indispensable étape préalable. Sans celle-ci aucune guérison n'est possible. Le rôle de l'entourage familial, médical ou professionnel est capital.
    • Le facteur déclenchant peut être une mise en demeure de l'entourage exigeant un comportement responsable.
  • Le sevrage doit être précédé d'un bilan préalable pourtant sur :
    • la motivation
    • les antécédents et les habitudes de consommation
    • les comportements alimentaires
    • les addictions associées
    • les troubles psychologiques associés éventuels qui peuvent être dépisté au moyen de différentes échelles : HAD, Beck-Pichot si au HAD le D est > à 8, échelle d'Angst (troubles bipolaires)
    • En cas de troubles psychologiques associés un traitement devra être mis en place.Toutefois, l'association alcool-médicaments psychotropes (antidépresseurs et anxiolytiques) rend la prescription délicate tant que dure l'intoxication alcoolique et doit être soigneusement pesée.
  • Les techniques classiques reposent sur une quadruple prise en charge qui peuvent se faire en ambulatoire ou en milieu hospitalier:
    • La prise en charge de la dépendance alcoolique et des conséquences du sevrage :
      • elle est précédée d'un bilan de l'état général clinique et biologique
      • elle associe des traitements réparateurs des lésions : réhydratation, vitaminothérapie B
      • des traitements préventifs du délirium tremens (sédatifs)
      • des psychotropes : anxiolytiques au moment du sevrage et éventuellement antidépresseurs, neuroleptiques, selon les cas, dans les suites immédiates ou secondaires du sevrage
      • et des traitements aversifs de l'alcool (Espéral, TTD B3-B4)
    • La prise en charge psycho-comportementale peut se réaliser à plusieurs niveaux :
      • comprendre le pourquoi et le comment du passage à une consommation nocive ou à une dépendance
      • transférer le plaisir lié à la prise d'alcool sur une autre activité moins dangereuse
      • développer des renforcements négatifs vis-à-vis de l'alcool
      • éventuellement se poursuivre dans le cadre d'une thérapie comportementale et cognitive pour un apprentissage de la sobriété émotionnelle
    • La prise en charge sociale consiste à :
      • analyser les situations favorables à l'alcoolisation et à trouver des réponses adaptées (pots sans alcool, activité sociale...)
      • faire face aux difficultés (vie de famille, logement, emploi) et mettre en place des solutions réalistes
    • La prise en charge des troubles associés est indispensable pour éviter les récidives :
      • troubles psychologiques
      • troubles alimentaires : prendre le temps de faire des repas équilibrés riches en légumes ; redécouvrir les saveurs et les odeurs...
  • Autres techniques de prises en charge : acupuncture, homéopathie, mésothérapie, hypnose, dont on ne connaît pas exactement le niveau d'action.

8.3.3. L'ACCOMPAGNEMENT POST-SEVRAGE

  • Il est indispensable aussi bien pour les salariés qui étaient en mésusage que pour les salariés dépendants car après une normalisation de la consommation d'alcool ou un sevrage alcoolique les rechutes restent possibles. Elles sont liées à la (ré)apparition de la dépendance psychique, à l'existence d'un état anxio-dépressif sous-jacent ou aigu, à un ralentissement intellectuel, à la persistance d'un environnement alcoolisant, à la persistance de problèmes sociaux. Chez la femme à la fin d'une grossesse qui avait été l'occasion d'un arrêt. Un suivi post-sevrage est nécessaire tant que persistent des problèmes médicaux, sociaux, familaux, et/ou professionnels et pour une durée minimum de 1 an après leur résolution.
  • Chez le consommateur en mésusage sans dépendance, le suivi a pour objectif de stabiliser la consommation en dessous des limites fixées par l'OMS. Chez l'alcoolo-dépendant, il vise à maintenir l'abstinence et à prévenir les réalcoolisations. Ce suivi doit assurer une prise en charge des troubles somatiques (médication antabuse -Espéral, TTD BH3-B4) ou facilitant le maintien de l'abstinence (Aotal, Revia), sport, diététique …), des entretiens réguliers de renforcement positif, éventuellement une thérapie comportementale et cognitive. En cas de réalcoolisation, il faut noter les progrès accomplis, les pièges à éviter, en vue d'une nouvelle tentative. En entreprise la lutte contre la reprise de consommation passe par la possibilité d'entretiens d'accompagnement post-sevrage, la limitation des occasions d'alcoolisation et le repérage des situations de stress associés à l'alcool.
  • Le maintien dans l'emploi des salariés en mésusage ou alcoolo-dépendants doit être systématiquement recherché en liaison avec les services de santé au travail et les axes de maintien dans l'emploi. Des formations ou des réorientations sont parfois à envisager.
  • "La maladie alcoolique est socialement transmissible, elle est aussi socialement guérissable." (Jacques Chaumette)

9. REGLEMENTATION

9.1. TEXTES LEGISLATIFS ET REGLEMENTAIRES

Alcool et mise en danger de la vie d'autrui :

  • Article 221-6 du Code pénal : violation d'une obligation de sécurité
  • Article 222-19 du Code pénal : violation d'une obligation de sécurité
  • Article 223-6 du Code pénal : non assistance en personne en danger

Alcool et travail :

  • Article R 4228-20 du code du travail : Aucune boisson alcoolisée autre que le vin, la bière, le cidre et le poiré n'est autorisée sur le lieu de travail
  • Article R 4228-21 du code du travail : Il est interdit de laisser entrer ou séjourner dans les lieux de travail des personnes en état d'ivresse

  • Article R 4624-18 du code du travail : Tout salarié bénéficie d'un examen médical à la demande de l'employeur ou à sa demande. La demande du salariés ne peut motiver aucune sanction.

Alcool et conduite :

  • Article L224-12 du Code de la route : condamnation d'un conducteur
  • Article L232-1 du Code de la route : homicide involontaire
  • Article L234-1 à L234-14 du Code de la route : conduite sous l'emprise d'un état alcoolique caractérisé par une concentration d'alcool dans le sang égale ou supérieure à 0,80 gramme par litre ou par une concentration d'alcool dans l'air expiré égale ou supérieure à 0,40 milligramme par litre
  • Loi n°70-597 du 9 juillet 1970. Loi instituant un taux légal d'alcoolémie et généralisant le dépistage par l'air expiré
  • Loi du 18 mai 1965 permettant les prélèvements sanguins pour le dépistage de l'alcoolémie
  • Loi n°54-439 du 15 avril 1954. Loi sur le traitement des alcooliques dangereux pour autrui.

9.2. RECOMMANDATIONS - NORMES - ETIQUETAGE - SIGNALISATION

  • Recommandations de l’OMS (seuils de toxicité) :
    • 3 verres standard par jour pour l’homme soit 21 verres par semaine
    • 2 verres standard par jour pour la femme soit 14 verres par semaine
    • Ne pas dépasser 3 à 4 verres par occasion
    • Respecter 1 jour par semaine sans alcool

9.3. ETIQUETAGE

  • La teneur en alcool doit être indiquée sur les étiquettes ainsi que la mention "Doit être consommé avec modération".

10. BIBLIOGRAPHIE

  • Addictions et travail
  • Entreprise et alcool...Des questions ? Groupe de travail de la région Nord Pas-de-Calais. (2005)
  • Faire face au risque alcool : bonnes pratiques en matière de prévention et gestion de crise. Formation organisée par COMUNDI (31 mai - 1 juin 2005) www.comundi.fr
  • Brochures d'information des divers organismes cités
  • L'alcoolisme en entreprise - Michel Vial - ANDCP Personnel N° 352 - Juillet 1994
  • La prise en charge du malade alcoolique - B. Granger, Y. Pélicier - Le concours médical - 25-6-1994
  • Les conséquences des dysfonctionnements familiaux liés aux alcoolisations problématiques et à l'alcoolisme - jean-François Croissant - H & S n° 70 et 71 - 3 et 4eme T 1993
  • Mieux connaître l'alcoolique - Haut comité d'étude et d'information sur l'alcoolique - La documentation française - 1979
  • Alcool et accidents de la route - J. Planques, L. Arbus - Les cahiers Sandoz - 1972

11. ADRESSES UTILES

AUTEURS : Nadine Bouhot (médecin du travail) (SNCF 75), Bertrand Fauquenot (Préventeur ANPAA)(75),Paul Kiritze-Topor (médecin du travail) (Société Française d'Alcoologie), Martine Taktouk (médecin du travail) (CIAMT 75), Pierrette Trilhe (médecin du travail) (retraitée (37)
La partie juridique est extraite de la communication de Maître Jean-Sébastien Capisano (SCP Fromont Briens et associés) à la formation Comundi
DATE DE CREATION : Juillet 2005
DERNIERE MISE A JOUR : Mai 2011

ANNEXES

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