Fiches de dangers

   Renforcer la culture de la prévention 

 

  L'AFTIM Bossons Futé est une association loi 1901 reconnue d'utilité publique.  

 

 

 

                                                                                                       

Bischloromethylether (CMR)(Pénibilité)(SIR)(SPP) (En cours)

FICHE DANGER BOSSONS FUTE N°132

Mots clés :

  • oxybischlorométhane ou oxyde de bischlorométhane; α,α’dichlorodiméthyl éther ; chlorométhyl bis ether; méthyl éther (dichloro-1,1P); BCME ; éther bischlorométhylique ou encore éther de bischlorométhyle ; ether de dischlorodiméthyl symétrique ; dischlorodiméthyl oxyde.
  • N°CAS : 542-88-1
  • N° CE (EINECS) : 208-832-8
  • Cancérogène groupe 1 pour le CIRC/IARC
  • Cancérogène groupe 1 pour la classification européenne (directive CE/CLP)

I. CONTEXTE

1.1. NATURE DES DANGERS

1.1.1. Définition

  • Danger/Risque
    • Un danger est toute source potentielle de dommage, de préjudice ou d'effet nocif à l'égard d'une chose ou d'une personne dans le milieu de travail.
    • Un risque est la probabilité qu'une personne subisse un préjudice ou des effets nocifs pour sa santé en cas d'exposition à un danger. Cette notion peut également s'appliquer à des situations où il y a perte de biens ou d'équipement.
  • Caractéristiques du produit
    • Le bis-chlorométhyléther est un composé liquide volatil et incolore à l’odeur suffocante utilisé dans la fabrication de composés organiques. Sa production industrielle s’est arrêtée dans la plupart des pays dans les années 80 suite à la découverte des risques de cancer qu’il représente. Cependant il peut toujours être produit et utilisé en petite quantité.
    • Sa formule brute est C2H4Cl2O
    • Au contact de l’eau le produit chauffe fortement et émet des fumées toxiques et corrosives.
      • Produit très inflammable  de catégorie 2 (H225 : liquide et vapeurs très inflammables)
      • Toxique de catégorie 3 (H301 : toxique si ingéré / H311 toxique si en contact avec la peau)
      • Toxique de catégorie 1 (H330 : fatal si inhalé)
      • Carcinogène de catégorie 1A (H350 : peut causer le cancer)
      • Toxique pour des organes cibles (système respiratoire) de catégorie 1 (H372 : cause des dommages suite à une exposition répétée)

1.1.2. Catégories de danger

  • Le produit présente des risques chimiques. Ses propriétés en font un liquide très inflammable mais également toxique à la fois si ingéré, si en contact avec la peau ou si inhalé. L’inhalation en particulier peut être mortelle ou causer à long terme un cancer bronchique primitif.
  • Il présente également des risques physiques en se mélangeant à l’air pour créer des atmosphères explosives.

1.2. PROFESSIONS EXPOSEES

  • Industrie chimique (synthèse organique, résine échangeuse d’ions), fabrication de plastique (styrène),
  • industrie textile.

II. DOMMAGES

2.1. GENERALITES

  •  Ses propriétés physico chimiques sont les suivantes :

État physique :

Liquide

Masse moléculaire :

114,97

Densité :

1,315 g/ml à 20 °C

Solubilité dans l'eau :

Sans objet 

Densité de vapeur (air=1) :

3,96

Point de fusion :

-41,5 °C

Point d'ébullition :

106,00 °C

Tension de vapeur :

30,00 mmHg    (3,99966 kPa) à 20 °C

Concentration à saturation :

39 473,6842 ppm

Coefficient de partage (eau/huile) :

0,38

Facteur de conversion (ppm->mg/m³) :

4,702

Point éclair :

<18.9 °C

  •  Les voies de pénétration sont à la fois cutanée et respiratoire. Ce produit n’étant plus très utilisé la fréquence d’exposition est faible. Cependant il n’est pas à négliger que certaines entreprises puissent y être exposées continuellement. Le produit étant CMR à la manière de l’amiante, il est hautement probable de contracter des dommages suite à une exposition non protégée au BCME.
  • Le bis-chlorométhyléther est très toxique pour la santé des usagers bien que ses effets dépendent de la quantité employée (généralement très faible) ainsi que de la fréquence de son utilisation. Ce toxique pénètre par la peau, les voies digestive et respiratoire. Ses effets sont immédiats lorsqu’il s’agit de corrosion (aigue) mais peuvent également être retardés dans le cas de l’inhalation provocant des cancers de l’appareil respiratoire plusieurs années plus tard (chronique).

2.2. DOMMAGES SUR LA PERSONNE (Effets sur)

2.2.1. Accident du travail

  • Par projection
    • Les projections oculaires peuvent entrainer des dégâts irréversibles voire la cécité.
    • Les contacts cutanés peuvent provoquer des irritations pouvant aller jusqu’à des brûlures graves, des ulcères, l’apparition de vésicules ou encore la nécrose de la peau.
  • par inhalation
    • L’inhalation du BCME entraine des œdèmes pulmonaire pouvant être détecté après un délai pouvant aller jusqu’à 48 heures via des difficultés respiratoire et une toux. L’inhalation entraine de ce fait une dyspnée et une baisse des capacités pulmonaire ainsi qu’une respiration sifflante.

2.2.2. Maladies professionnelles reconnue

  • Tableau n° 81 RG : Affections malignes provoquées par le bis(chlorométhyle)éther - Cancer bronchique primitif

2.2.3. Autres dommages

Aucun effet mutagène ou reprotoxique n’a été mis en évidence à ce jour chez l’homme. En revanche ces effets ont été constatés chez les souris et chez les cellules d’avoine. 

2.3. DOMMAGES SUR L'ENVIRONNEMENT

  • Risque de pollution en cas d’incendie.
  • Mutagène sur les bactéries (entraine la détérioration des enzymes de réparation de l’ADN) et carcinogène chez les animaux. La concentration létale 50 chez les souris est de 5.3 ppm (Leong et al. 1971)
  • Peut-être dangereux pour les organismes aquatiques. (CDC)

2.4. CONSEQUENCES SOCIO-ECONOMIQUES

  • En France, le coût moyen de la prise en charge d’un cancer bronchique se situe entre 20 000 et 27 000 euros. (5)

III. DONNEES JURIDIQUES ET NORMATIVES

3.1. PARAMETRES

  • VLEP(3) (8h) : 0.001 ppm ou 0.005 mg/m3
  • N°CAS : 542-88-1
  • N° CE (EINECS) : 208-832-8

3.2. REGLEMENTATION

  • Elle relève
    • des articles L 4411-1 à 7 et L 4412-1 et R 4411-1 à R 4411-83 ; R 4412-1 à 160 du code du travail et de l'annexe II de l'arrêté du 6 décembre 2011 pour le suivi post professionnel
  • La priorité est la suppression du produit CMR et, si cela est impossible sa substitution. Celle-ci est obligatoire si techniquement possible pour tout produit CMR.
  • Si la substitution reste impossible il faut mettre en place un ensemble d’actions afin de réduire le plus possible le niveau de risque. Pour réduire ce niveau de risque il est possible d’agir sur la quantité de produit utilisée, sa fréquence d’utilisation, le nombre de salariés exposés ou encore la durée d’utilisation du produit.
  • Des mesures de concentration de l’agent chimique ainsi que les niveaux d’exposition doivent être faits afin de voir si les limites d’exposition professionnelles sont respectées ainsi que de vérifier la pérennité des mesures de prévention mises en œuvre.
  • Le suivi médical des salariés exposés est obligatoire.
  • Certaines catégories de personnes sensibles ont interdiction de travailler en contact avec ce type de produit (femmes enceintes, jeunes de moins de 18 ans…).
  • Le dépassement des VLEP entraine l’arrêt immédiat du travail jusqu’à la mise en place d’actions correctives.

3.3. OBLIGATIONS

  • De l'employeur : responsable de la santé et sécurité du travailleur, élimination des produits, mesure annuelle des concentrations de produits cancérigène dans l’air par organisme agréé (si dépassement, arrêt de travail)
  • Du salarié : respect des règles de sécurité
  • Des services de santé au travail : se tenir informé des résultats des mesures, faire des visites médicales pour les salariés, veiller au respect des mesures de sécurité, mettre au point des plan d’action afin de réduire le risque.

IV - EVALUATION

4.1. GENERALITES

Il est nécessaire de faire une évaluation du risque représenté par le produit. Pour cela il faut prendre en compte ses caractéristiques (mention de danger et pictogrammes, les informations de la fiche de donnée de sécurité [FDS]) ainsi que le process de travail utilisé (quantité, protections collectives et/ou individuelles, fréquence d’exposition…).

4.2. METROLOGIE/BIOMETROLOGIE

4.2.1. Métrologie(6) : mesures d’ambiance et prélèvements dans l’environnement. 

  • Un organisme agréé est tenu d’effectuer des mesures du taux de BCME dans l’air et dans les conditions normales de travail au moins une fois par an.
  • Ces mesures sont faites par prélèvement d’échantillon d’air via un appareil spécialisé
  • En cas de modification des installations ou des conditions de fabrication susceptible d'avoir un effet sur les émissions d'agents cancérogènes, nouveau contrôle dans un délai de quinze jours.
  • Communication des résultats doit être faite au médecin du travail, au CHSCT ou à défaut, aux délégués du personnel.

4.2.2.Biométrologie : dosages des quantités dans le corps via les mesures d’indicateurs présents dans le sang et les urines.

  • Il est impossible de mesurer l’absorption cutanée du produit,
  • Cependant il est nécessaire de la prendre en compte lors de l’évaluation des risques, le produit étant irritant.

4.3. BASES DE DONNEES

  • GESTIS (base de données allemande)
  • CCST (base de données canadienne)
  • Inventaire 2005 des agents CMR (INRS)
  • DEMETER
  • BIOTOX
  • EPICEA
  • METROPOL
  • SOVEX
  • PROTECT PO
  • ECHA
  • PREMEDIA

V. PREVENTION

5.1. TECHNIQUE

  • Substituer l'agent chimique dangereux par un agent non ou moins dangereux, quand c'est possible
  • Les locaux doivent être pourvus d’une ventilation adéquate, l’équipement électrique et l’éclairage doivent être protégés des explosions.
  • Travailler en vase clos lorsqu'il est possible
  • Aspirer les vapeurs ou les poussières à la source
  • Encoffrement de la machine
  • Mécanisation des opérations nécessitant l’utilisation du BCME.
  • Mise à disposition de douches de sécurité et de fontaines oculaires
  • Vérification périodique des installations et des dispositifs de sécurité
  • Réduction au minimum du nombre de travailleurs exposés avec mise en place d'une signalisation pour limiter l'accès aux zones dangereuses
  • Réduction au minimum de la durée et de l'intensité de l'exposition
  • Moyens de secours et de lutte contre l'incendie adaptés

5.2. ORGANISATIONNELLE

  • Récupérer et étudier les fiches de données de sécurité des produits utilisés et les fiches toxicologiques INRS éventuelles
  • Etablir des procédures de travail adéquates, notamment des dispositions assurant la sécurité lors de la manutention, le stockage et le transport sur le lieu de travail des agents chimiques dangereux et des déchets contenant ces agents
  • Prévoir un bac de rétention au niveau du stockage de sorte à ce qu’en cas de fuite le produit ne s’écoule pas librement, on privilégiera également un stockage dans un local ventilé.
  • Définir des zones d’accès restreint (zonage) au personnel dont la mission exige la manipulation du BCME. C’est-à-dire signaliser ces zones avec des pictogrammes voir en restreindre l’accès avec des badges. Il faut signaliser les locaux où ce produit est utilisé via les pictogrammes.
  • Etiqueter les produits conformément à la réglementation
  • Réduire au minimum de la quantité d'agents chimiques sur le lieu de travail pour le type de travail concerné
  • Stoker et utiliser les produits  à l’abri des points chauds et flammes nues.
  • Mettre en place d'une signalisation pour le port des équipements de protection individuelle
  • Etablir d'un plan de prévention en cas d'intervention d'une entreprise extérieure
  • Interdiction de boire, manger, fumer sur le lieu de travail
  • Essayer d’améliorer constamment les procédés et conditions de travail.

5.3. PREVENTION HUMAINE

5.3.1. FORMATION / INFORMATION

  • Code du travail
    • Information générale Art R 4412-38
    • Notice de poste Art R 4412-39
    • Etiquetage obligatoire des récipients, sacs ou enveloppes Art R 4412-39-1
  • Former à et faire respecter les bonnes pratiques de laboratoire
  • Former à l’utilisation du produit, des équipements et des protections individuelles.
  • Former aux consignes d'hygiène et de sécurité
  • Former à la lecture des étiquettes et des pictogrammes
  • Expliquer l'interdiction de fumer, de boire ou manger sur le poste de travail

5.3.2. SUIVI MEDICAL (7)

  • Les visites médicale sont obligatoires pour les salariés; Elles comportent
    • Une visite de suivi individuel renforcé (VSIR) préalable à l'affectation sur le poste par le médecin du travail pour les salariés exposés aux agents CMR
    • La périodicité des visites de suivi individuel renforcé de 2 ans pour les salariés exposés aux agents CMR
  • le contenu de la visite comprend
    • un examen clinique général
    • et selon la nature de l'exposition, un ou plusieurs examens spécialisés complémentaires auxquels le médecin du travail procède ou fait procéder. Ces examens sont pris en charge par le service de santé au travail
  • Le dossier médical doit contenir u moins
    • une copie de la fiche de pénibilité (Art L 4121-3-1) qui remplace la fiche d'exposition prévue à l'article R. 4412-41
    • Les dates et les résultats des examens médicaux complémentaires pratiqués.
    • Prévoir une conservation du dossier médical d'au moins 50 ans après la fin de l'exposition
  • Le suivi post professionnel est un droit
    • Il doit être demandé à la caisse d'assurance maladie en cas de chômage ou de retraite
    • Il comprend un examen clinique et une radiographie pulmonaire tous les 2 ans pris à charge à 100%

5.3.3. EPI

Il est nécessaire de porter des EPI afin de se prémunir des effets indésirables du BCME pour cela il faut prévoir des protections cutanées comme des gants mais aussi des lunettes de protection ainsi qu’un appareil respiratoire. On peut imaginer que l’appareil respiratoire adéquat sera isolé de l’atmosphère extérieure à la manière de ceux utilisés pour le retrait d’amiante. Les lunettes ou écrans faciaux de protection sont eux à prévoir en tant que barrière physique à toute éventuelle projection.

VI. REFERENCES

6.1. JURIDIQUES : DIRECTIVES, LOIS ET REGLEMENTS

  • Les textes phares internationaux et européens
    • Règlement (CE) no 1272/2008 du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relatif à la classification, à l’étiquetage et à l’emballage des substances et des mélanges, modifiant et abrogeant les directives 67/548/CEE et 1999/45/CE et modifiant le règlement (CE) ne 1907/2006
    • Directive 2014/27/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 modifiant les directives du Conseil 92/58/CEE, 92/85/CEE, 94/33/CE, 98/24/CE et la directive 2004/37/CE du Parlement européen et du Conseil afin de les aligner sur le règlement (CE) no 1272/2008 relatif à la classification, à l’étiquetage et à l’emballage des substances et des mélanges
  • les textes français
    • Le code du travail
      • Agent chimiques dangereux
        • Art  L4411-1 à L4411-7 et R4411-1 à R4411-84 sur la fabrication, la mise sur le marché et l'utilisation des produits
        • Art L4412-1 et Art R4412-1 à R4412-164 sur les mesures de prévention du risque chimique
        • Art R4412-59 à R4412-93 sur les agents CMR
        • Art L4731-2 sur le dépassement de la valeur limite de concentration d'une substance chimique cancérogène, mutagène ou toxique pour la reproduction
        • Art R4535-9 sur le risque chimique des travailleurs indépendants et des employeurs sur un chantier du BTP
        • Art 4731-2 (arrêt d’activité suite à mise en demeure)
    • Autres textes
      • Arrêté du 28/02/1995, Annexe II modifié par l'Arrêté du 6 décembre 2011 
      • Circulaire du 14/05/85 relative à la prévention des cancers d’origine professionnelle fixant le modèle type d'attestation d'exposition et les modalités d'examen dans le cadre du suivi post professionnel des salariés ayant été exposés à des agents ou des procédés cancérogènes

6.2. RECOMMANDATIONS - NORMES

  • Recommandations de la CNAMTS
    • R 409 Evaluation du risque chimique (2004)
  • Normes françaises, européennes…
    • Etiquetage, phrase de risque et de sécurité
      • R 45 : peut causer le cancer
  • Conférences de consensus et bonnes pratiques

6.3. BIBLIOGRAPHIE ET SITOGRAPHIE

REDACTION

  • AUTEURS : Pierrette TRILHE médecin du travail retraitée Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser. ;
  • DATE DE CREATION : décembre 2011
  • RELECTEURS : PELTIER Agnès et PETIT Laura  Etudiantes à l'université d'Amiens
  • DERNIERE MISE A JOUR : 22/3/2017